CEDH 18 janvier 2011 requête n°2555/03 Guadagnino contre Italie et France
Cet arrêt marque l’issue d’un imbroglio juridictionnel qui a amené Mme Guadagnino à saisir la Cour Européenne des Droits de l’Homme afin de faire reconnaitre le déni de justice dont elle a été victime. A l’appui de sa demande, elle invoque l’article 6§1 de la Convention (Droit à procès équitable). Pour mieux comprendre comment la Cour de Strasbourg a pu aboutir à octroyer des dommages et intérêts pour réparation du préjudice matériel et moral.
Mme Guadagnino était employée par l’Ecole Française de Rome comme assistante au service des publications. Son contrat conclu avec le Ministère français de l’Education nationale prévoyait l’application de la loi italienne à ce contrat.
Or, la salariée a engagée successivement deux procédures devant les juridictions nationales italiennes devant le Tribunal d’Instance de Rome. D’une part, elle a pu le saisir en 1995 afin de lui demander d’établir le bien-fondé de la reconstitution de sa carrière et le paiement d’indemnité. Concernant ce grief, la Cour de Cassation italienne, par un arrêt du 20 juin 1997, a rappelé que les juridictions italiennes n’étaient pas compétentes du seul fait de la soumission du contrat de travail au droit italien. Cet argument étant jugé comme n’étant pas significatif. D’autre part, la salariée a soulevé en 2007, la nullité de sa mise à la retraite à l’âge de 60 ans sachant que la législation italienne pose comme limite d’âge 65 ans. A cela, le juge italien s’est reconnu incompétent, au motif que la jurisprudence italienne admet de manière constante que le personnel des institutions culturelles françaises relève de la juridiction française, mais qu’il admet uniquement sa compétence concernant les rétributions. Or, Mme Guadagnino n’a pas repris cette procédure.
Compte tenu de la position italienne, la demanderesse a saisi en 2001 le Conseil d’Etat français, mais hélas, celui-ci s’est déclaré incompétent dans l’analyse du litige en matière d’exécution et de rupture des contrats de travail internationaux conclu avec les services de l’état. Ainsi, la haute juridiction administrative se déclare implicitement incompétente au profit de la juridiction prud’homale.
Mais qu’en est-il de la position de la Cour européenne des Droits de l’homme ?
La Cour raisonne Etat par Etat afin de vérifier que les deux états mis en cause par la salariée applique bien l’article 6§1 de la Convention.
Concernant l’Italie : La cour condamne l’état italien à 15.000 euros de dommages et intérêts au profit de la salariée pour méconnaissance de l’article 6§1. La Cour analyse tour à tour le but légitime invoqué par l’état et le caractère proportionné au but poursuivi.
Concernant la France : A contrario, la Cour reconnait irrecevable la requête de la salariée à l’encontre de l’Etat français. En effet, le Conseil des Prud’homme est seul compétent même si le contrat de travail est régi par le droit italien. La Cour regrette cependant, le manque de clause attributive de compétence dans le contrat litigieux qui aurait pu permettre à la salariée de saisir les juridictions adéquates. D’autant qu’en France, elle disposait de voie de recours efficace. En conséquence de quoi, la condition de recevabilité de la saisine de la Cour mentionnée à l’article 35 de la Convention, imposant l’épuisement des voies de recours interne, n’est pas présente au cas d’espèce.
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Concernant les contrats de travail internationaux, il convient de porter une attention toute particulière au droit applicable au contrat (généralement le droit du lieu d’exécution de la prestation) et en cas de différence avec la juridiction compétente, il convient pour une meilleure sécurité juridique, d’inclure une clause attributive de compétence, pour éviter tout malentendu.
Article rédigé par Mlle. Mourot pour Information-juridique.com