Dans une décision d'arbitrage de l'Organisation Mondiale de la Propriété Iintellectuelle du 2 avril 2010, l'expert en charge du dossier décide que le demandeur à un litige relatif à un nom de domaine, dans une procédure alternative de résolution des litiges, a la possibilité, après un échec, de formuler une même demande pour une même cause et contre le même défendeur, à certaines conditions. Nous allons les étudier dans les développements suivants puisque l'argument central de la recevabilité de la demande est fondamental avant toute appréciation au fond.
I° La recevabilité de la demande :
A) Le principe de l'autorité de la chose jugée :
L'article 1351 du Code civil dispose que l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de
ce qui a fait l'objet d'un jugement. Il faut que la chose demandée soit la même; que la demande soit fondée sur la même cause ; que la demande soit entre les mêmes parties, et formée par elles et
contre elles en la même qualité.
En l'espèce, il s'agissait bien des même parties, du même objet consistant en pratique en une demande de transferts du nom de domaine et de la même cause, usage et enregistrement d'un nom de domaine causant une atteinte au droit de la concurrence national et communautaire.
De plus, l'appréciation de la jurisprudence de la notion de jugement englobe les transactions et les sentences arbitrales. Or, ici on fait face à une particularité.
B) Particularité du cas d'espèce :
En pratique, on se trouve face à une décision rendue dans le cadre du Règlement sur la Procédure Alternative de Résolution de Litiges (Article 18 de la Charte de nommage pour les noms de domaine.fr et l’article R.20-44-49 du Code des postes et des communications électroniques , qui a une nature technique).
Compte tenu du principe de l'autorité de la chose jugée, la demande semblait être irrecevable sauf cas particulier. Ce cas concerne des circonstances exceptionnelles limitées. On reprendra l'exemple donné par la présente décision. Dans l'affaire Alpine Entertainment Group INC. v. Walter Alvarez Litige OMPI N° D2007-1082, il s'agissait de l'apparition de faits postérieurs à la première plainte, et
en matière de droit des marques, le fait que celle-ci n'ait pas été enregistrée lors du dépôt de la première plainte et qu'elle le soit depuis est un fait nouveau susceptible d'influencer l'expert dans son appréciation du cas.
Ainsi, par analogie, l'acquisition de la dite marque par la société auprès du cessionnaire anglais permet l'admissibilité de la demande auprès de l'expert de l'OMPI. Qu'en est-il de l'appréciation sur le fond de l'affaire ?
II° Appréciation au fond.
On doit préalablement rappeler que tant le droit communautaire que celui national apprécie l'atteinte au droit de la concurrence au travers notamment du risque de confusion entre les deux noms de domaines : en l'espèce, <toy-watch.fr> et <toywatch.fr> au regard de <toy-watch.it>, <toy-watch.eu>, et <toy-watch.us>.
Or ici, on ne se situe pas dans un rapport de concurrence entre les deux parties puisque le défendeur ne faisait pas d'usage commercial du dit nom de domaine. Bien que la similitude des noms de domaines soit réelle, l'argument du « rapport de concurrence » est fondamental. En effet, si les parties ne sont pas dans un rapport de concurrence, il ne peut y avoir rupture de l'égalité entre celle-ci.
De plus, outre le caractère dénigrant des propos publiés sur les sites du défendeur, les experts de l' OMPI les ont placés sous l'argument tiré du droit à valeur constitutionnelle de la liberté d'expression pour informer les consommateurs sur la provenance (Japon et non pas Chine) et de la fabrication des montres TOYWATCH (à bas coût). En conséquence, la demande de l'industriel a été rejetée.
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Gageons que les tentatives de monnayage des noms de domaine ont encore de beaux jours devant elles puisque reste seule à cette société en pleine expansion à racheter au prix fort soit 700 000 € le nom de domaine pour ne pas voir ternir sa E-réputation naissante en France avec un site aux propos peu flatteurs.